L'État belge face aux enjeux de qualité alimentaire dans la seconde moitié du 19e siècle. Responsabilisation et institutionnalisation consacrées par les lois des 17 mars 1856 et 4 août 1890 relatives à la falsification alimentaire

L’assurance de la qualité alimentaire implique sa définition légale, l’organisation de sa surveillance et l’application d’une répression. Au cours du 19e siècle, deux lois, adoptées en 1856 et en 1890, abordent ces trois aspects et consacrent la responsabilisation et l’action de l’Etat dans cette matière jusque-là réservée aux autorités communales. Apparaissant comme des “lois de circonstance” car cherchant à résoudre des situations critiques, elles ne doivent pas être appréhendées individuellement. Si la loi de 1856 établit le principe d’information du consommateur selon lequel la denrée s’éloignant de sa composition normale sans porter préjudice à la santé constitue une infraction lorsque cet écart n’est pas stipulé, elle néglige une condition essentielle à son application : sa définition. La loi de 1890 répond à cette lacune en confiant la réglementation des denrées au Gouvernement. Parallèlement, elle l’investit de l’organisation d’une surveillance en vue d’assurer la répression.

En s’opposant à la “falsification”, les lois de 1856 et 1890 attestent des changements qui renouvellent la perception de la qualité alimentaire. Les découvertes médicales et l’élaboration de théories nutritionnelles insistent sur l’importance d’une alimentation qualitativement satisfaisante pour la santé publique. Si les innovations alimentaires sont jugées suspectes, elles constituent souvent moins un danger sanitaire qu’un péril pour le modèle de production agricole auquel l’industrie agroalimentaire oppose une concurrence nouvelle. À la qualité alimentaire, sont donc liés des enjeux sanitaires, économiques et sociaux dont le contenu et l’articulation évoluent. Il en résulte que cette notion est multiforme, sans toutefois qu’une certaine permanence spatio-temporelle ne puisse être observée dans les mouvements d’adoptions simultanées de lois nationales consacrant des principes communs et la pérennité acquise par certains principes posés au 19e siècle.